jeudi 4 octobre 2018

dromadaire

photo : Sébastien Berrut (GEO)
 De nombreux touristes visitant le site de Guizeh complètent leur excursion par une courte escapade, dûment accompagnée, dans les sables du désert environnant. Certains choisissent le cheval comme monture ; d’autres préfèrent la version plus couleur locale de la randonnée, à savoir à dos de dromadaire.
Encore faut-il savoir comment se comporter avec ce vaisseau du désert dont la pratique est pour le moins peu courante, en dehors de la société bédouine. Mieux vaut donc s’en remettre aux guides locaux, bien attentionnés et de bon conseil pour les néophytes de ce genre d’aventure.
Histoire de se mettre dans l’ambiance et d’anticiper de belles émotions, voici les conseils que donnait, dans ses Lettres sur l'Égypte, Jules Barthélemy-Saint-Hilaire (1805-1895), qui fut membre de la commission internationale chargée d'étudier le projet de Ferdinand de Lesseps de percement du canal de Suez :
C'est surtout du dromadaire que je voulais vous entretenir. (...) J'avoue que, quand on regarde pour la première fois cette hauteur où l'on doit aller se placer, le sentiment qu'on éprouve est une sorte d'effroi, ou tout au moins d'appréhension. (...)
La difficulté véritable, c'est de monter. Quoiqu'on la surmonte avec quelque habitude, elle reste toujours assez grande, même avec les bêtes les meilleures et les plus dociles. Permettez-moi de vous décrire la manière dont on s'y prend.
Il faut d'abord faire accroupir l'animal. Pour cela, on tire son licou pour lui faire baisser la tête ; et, afin qu'il ne s'y trompe pas, on accompagne ce mouvement d'un certain bruit de gosier qu'il connaît très spécialement. Quand le dromadaire est couché, il est encore fort haut ; et il serait impossible de l'enfourcher, ou du moins il faudrait sauter en selle avec une prestesse que tout le monde ne possède pas. Il faut donc avoir un étrier qui s'attache au pommeau antérieur de la selle ; on y met le pied gauche, et l'on enjambe du pied droit.
C'est ici que commence le danger, si danger il y a. Dès que le chameau vous sent le pied à l'étrier, il cherche à se relever sur-le-champ ; et plus l'animal est distingué, plus ce mouvement est brusque et rapide. On ne laisserait pas que de se trouver en une situation périlleuse, si la bête se dressait tout à coup quand on a le pied gauche pris dans l'étrier et que les mains n'ont pas encore eu le temps de saisir les pommeaux. Pour prévenir tout embarras, on fait ordinairement tenir par quelqu'un le licou, tandis qu'on monte. Ce quelqu'un, fort utile, tient le licou baissé pour que l'animal ne redresse point la tête, et lui appuie même le pied sur la jambe pour qu'elle ne se déplie pas trop tôt. Quand on est seul, il faut ou sauter lestement en selle avant que le chameau ne se relève, ou lui appuyer soi-même la main gauche sur le col qu'on serre assez fortement.
Une fois en selle, on a une autre épreuve à subir. Le dromadaire va se mettre debout. Comme il relève d'abord ses jambes de derrière l'une après l'autre, et il est le seul parmi tous les animaux à se relever ainsi, il vous rejette par ce mouvement tout en avant de la selle où vous êtes renversé ; puis, relevant ensuite son train de devant, il vous rejette aussi violemment en arrière. Après ces deux oscillations de fort tangage, vous êtes assis tranquillement en selle ; et vous n'avez plus qu'à jouir de la douceur, de la solidité et de la force invincible de votre monture. (...)
Une fois en selle, on peut y varier sa position autant qu'on le veut. Habituellement, on est assis à peu près comme les femmes à cheval. On a la jambe droite pliée à lenteur du pommeau de devant, qu'on a devant soi. Elle y appuie très solidement et le pied pose sur le cou de l'animal. La jambe gauche porte toujours sur l'étrier et le corps entier est un peu tourné à gauche. On peut, si l'on veut, prendre la situation inverse, mettre la jambe gauche autour du pommeau, le pied droit, dans l'étrier qu'on a changé de côté, et le haut du corps, tourné à droite en arrière. On peut encore se mettre les jambes pendantes des deux côtés, comme si l'on était à cheval; ou, enfin, on peut les réunir en les croisant toutes deux devant soi autour du pommeau; elles portent alors l'une et l'autre sur le col du chameau.
Il est beaucoup plus facile de diriger la bête que d'y monter. On a d'ordinaire un petit bâton recourbé qui sert à ramasser le licou, sans se baisser, quand par hasard on l'a laissé tomber de sa main. Lorsqu'on veut mener l'animal à gauche, on le touche sur le col à droite avec le bâton. Si on veut le mener à droite, on le touche à gauche. Pour l'animer, on le frappe du talon qui repose dans l'étrier, et qui est à peu près sur son épaule.
Le chameau, touché en cet endroit, se met sur-le-champ à trotter ; ou, du moins, il hâte le pas. Pour l'arrêter, c'est du licou qu'il faut se servir. On le tend assez fortement en arrière, et la bête s'arrête assez vite sans d'ailleurs s'arrêter court.
Mais ce n'est pas tout que de monter à chameau et de s'y tenir. Il faut de plus savoir en descendre, et il y a ici encore un procédé qu'il faut connaître. On a des oscillations et du tangage comme pour monter. Seulement, les mouvements sont contraires.


Cet article a d'abord été publié dans "égyptophile" : voir ICI

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